Pour que la stratégie ne se limite pas à un catalogue de bonnes intentions, sans retombées concrètes, elle doit être traduite en actions avec méthode, selon un processus combinant rigueur et
souplesse. La première étape de ce processus consiste à formuler la stratégie sous forme d'un ensemble d'objectifs répondant au cahier des charges suivant :
- Pour éviter une dispersion des ressources humaines et financières, la stratégie doit se focaliser sur un petit
nombre d'objectifs ;
- Pour que le comportement interne de l'organisme soit parfaitement adapté au comportement externe recherché, les objectifs
internes et externes de la stratégie doivent être alignés ;
- Pour que l'action soit efficace et la logique de l'action plus facile à expliquer, la stratégie doit être conçue
et présentée comme un système d'objectifs cohérent, organisé autour de thèmes clés ;
- Pour démultiplier les actions et suivre les réalisations, la stratégie doit être associée à un système de
mesure adéquat.
Le tableau de bord prospectif (ou TBP) – concept développé par Robert S. Kaplan et David P. Norton au
début des années 1990 – répond parfaitement à ces différentes exigences. Conçu au départ comme un outil de mesure de la performance, sous l'appellation de Balanced Scorecard, le concept a évolué
et s'est étoffé pour devenir un système de management stratégique complet et particulièrement efficace.
Le TBP formalise la stratégie en l'inscrivant dans un format plus ou moins standardisé, relativement
contraignant, qui répond aux exigences suivantes :
- Le nombre d'objectifs est limité à une vingtaine ;
- Les objectifs sont répartis de façon équilibrée entre 4 domaines de performance : résultats clés, marchés
et environnement, fonctionnement interne et ressources internes actionnables ;
- Les objectifs choisis constituent un système cohérent, formé par le regroupement d'éléments convergents,
interdépendants et qui tendent à se conforter mutuellement ;
- Les objectifs choisis dans chaque domaine ainsi que les relations de cause à effet existant entre eux sont
représentés sous la forme d'une carte stratégique. Cette dernière explicite la logique de la stratégie et facilite sa communication au sein de l'organisme ;
- À chaque objectif sont associés un ou plusieurs indicateurs de mesure avec les valeurs cibles à atteindre à
chaque échéance considérée. Les indicateurs ainsi définis avec les résultats obtenus constituent le tableau de bord stratégique de l'organisme, qui sert à suivre la mise en œuvre
de sa stratégie. Le nombre d'indicateurs à suivre est limité à une trentaine.
Les éléments permanents des stratégies sont définis dans les documents de l'entreprise : charte du management, règlement intérieur, manuel qualité… Les éléments variables sont définis sous forme
d'objectifs à atteindre et intégrés dans le TBP, qui se substitue alors aux outils de la planification stratégique dénoncée par Henry Mintzberg dans Grandeur et décadence de la
planification stratégique.
Le TBP répond à deux types de besoins par deux types d'outils interdépendants :
- La carte stratégique répond au besoin de sens nécessaire à l'appropriation de la stratégie par les acteurs
de l'entreprise. En effet, les objectifs inscrits dans le TBP ne peuvent former une stratégie que s'ils répondent à une certaine logique. C'est cette logique qu'exprime la carte
stratégique, qui permet de visualiser et de mettre en relations de cause à effet l'ensemble des objectifs internes et externes de l'entreprise. C'est un outil de
communication.
- Le tableau de bord proprement dit répond au besoin d'animer et de suivre la mise en œuvre de la stratégie
au travers des multiples actions engagées par les différents acteurs de l'entreprise. Ainsi, à chaque objectif est associé un ou plusieurs indicateurs dont on peut suivre l'évolution en
rapport avec les valeurs cibles fixées. C'est un outil d'action.
Le schéma ci-dessous présente les deux types d'outils et leur correspondance.